Bien avant la présidentielle 2025 du Cameroun, l’espace numérique s’est transformé en un camp de guerre. Entre rumeurs virales, messages alarmistes et publications émotionnelles… Une toile sous pression Bien que l’espace numérique camerounais soit en ébullition, la pression a augmenté depuis l’annonce des résultats de la présidentielle de 2025. Internet au Cameroun n’est plus seulement un outil de communication, mais un véritable champ de tension. D’un côté, la désinformation circule à grande vitesse : rumeurs alarmistes, vidéos sorties de leur contexte, récits d’incidents difficiles à vérifier. De l’autre, la répression numérique se renforce : données effacées, blocages ciblés, intimidations de journalistes,de cyber activistes et de citoyens. Le paradoxe est frappant : alors que certains messages alarmistes justifient la vigilance, c’est la liberté d’expression elle-même qui est menacée. Et les réseaux sociaux se transforment en arènes où les émotions prennent le pas sur les faits. Des profils anonymes, peu ou très connus diffusent des récits inquiétants : des tirs sur des civils, des arrestations ciblées, des violences dans les quartiers, souvent signés de pseudos comme « N’zui Manto« . La désinformation comme prétexte Les jours post-électoraux ont vu se multiplier des contenus viraux signés de certains médias, d’activistes web, d’hommes politiques, de personnes dites « proches du pouvoir » ou de profils non vérifiés, décrivant des violences, des arrestations ou des actions de milices. Ces publications, souvent partagées avec émotion, provoquent un climat de peur et de méfiance, et donnent parfois aux autorités un prétexte pour intervenir numériquement. Ainsi, les efforts pour “lutter contre les fake news” peuvent se transformer en instrument de censure, où les voix citoyennes les plus lucides et critiques sont réduites au silence. La désinformation justifie la censure, et la censure alimente la désinformation. C’est le cercle vicieux d’un internet sous tension. La répression numérique : l’autre visage de la crise Certains médias et activistes indépendants ont rapporté des comptes suspendus ou supprimés, des publications ou données effacées, des intimidations directes liées à des enquêtes, des vidéos virales ou des reportages critiques. Alors que la désinformation prospère, les espaces d’expression sécurisés se rétrécissent. Le droit à l’information, pilier fondamental de la démocratie, se retrouve fragilisé. Internet comme baromètre de la liberté Un pays où l’on surveille les mots est un pays qui se méfie de ses citoyens. La liberté d’expression ne s’arrête pas aux portes du numérique : elle s’y mesure, s’y teste, s’y protège. Un Internet surveillé et restreint reflète le climat politique réel : quand la parole citoyenne est muselée, la confiance s’érode. Les coupures ou ralentissements d’accès aux réseaux sociaux ne sont pas de simples mesures techniques : elles affectent directement la capacité des citoyens à comprendre et à agir. Internet n’est pas un luxe, c’est un thermomètre démocratique. Lorsque la liberté d’expression est limitée, ce sont les fondations mêmes de la démocratie qui vacillent. Éduquer, vérifier, résister Face à cette double menace, désinformation et répression, il existe une réponse citoyenne: l’esprit critique. Elle doit être collective et réfléchie : – Vérifier chaque information avant de la partager. – Croiser les sources et s’informer auprès de médias fiables. – Protéger et soutenir les journalistes, activistes web, et voix indépendantes. Tout ceci témoigne de l’importance de l’éducation aux médias et à l’information (EMI). Ce n’est pas une option : c’est la clé pour que les citoyens défendent leur droit à la parole et à l’information en toute responsabilité. Conclusion En période post-électorale, la démocratie ne se limite pas au vote. Elle se mesure aussi à la capacité des citoyens à parler, à s’informer et à débattre librement. Sur Internet, l’esprit critique reste la meilleure arme contre la manipulation et la censure. Protéger cette liberté, c’est protéger la voix du peuple. Défendre internet et la liberté d’expression, c’est défendre le droit de penser, de questionner et de partager, même quand les mots dérangent. Sur la toile, l’esprit critique est notre meilleure arme.